vendredi 25 février 2011

JP Morgan, la Chartreuse et la recette du Alamagoozlum Cocktail

John Pierpont Morgan (1837-1913) en plus d’avoir donné son nom à l’une des plus importantes banques d’affaires anglosaxonnes est aussi connu pour son goût des boissons alcoolisées et pour sa contribution à la palette des cocktails. On lui doit notamment l’Alamagoozlum, cocktail dont le nom semble aussi alambiqué que sa composition à base de 8 ingrédients dont de la chartreuse !

Ce cocktail est mentionné dans “The Gentleman’s Companion or Around the World with Jigger, Beaker and Flask” de Charles H. Baker de 1939 :
“J. Pierpont Morgan’s Alamagoozlum: the Personal Mix Credited to that Financier, Philanthropist & Banker of a Bygone Era.” 
Il en est aussi question dans le “Fine Art of Mixing Cocktails” de David A. Embury publié en 1948 ainsi que dans “Vintage Spirits and Forgotten Cocktails” de Ted Haigh.

De composition sophistiquée, l’Alamagoozlum intègre des ingrédients peu commnus pour certains (sirop de gomme arabique), relativement variés dont une dose importante de bitter et du blanc d’oeuf cru. A noter que selon les recettes on peut aussi bien utiliser de la chartreuse verte que de la jaune. On le décrit comme assez fort, à la texture intéressante, épaisse et douce, avec un arrière goût herbeux et épicé prononcé. En voici la composition :
  • ½ blanc d’oeuf
  • 60 ml de Genièvre
  • 60 ml d’eau
  • 45 ml de Rhum jamaïquain
  • 45 ml de Chartreuse jaune ou verte
  • 45 ml de sirop de gomme arabique
  • 15 ml de curaçao orange
  • 15 ml d’Angostura bitter
Comme l’indique l’étiquette ajoutée sur cette bouteille estampillée Dubonnet du XIXème sièce, cette chartreuse est issue de la cave de JP Morgan et fut plus tard destinée à ses amis en sa mémoire :

From the cellar of J. Pierpont Morgan 1837-1913 | A souvenir to his friends 1915 

lundi 14 février 2011

Mystérieuses mignonnettes

Les mignonnettes éveillent depuis des années la curiosité de nombreux collectionneurs, aussi bien par leur profusion que par leur variété. Elles font l’objet de convoitises tant leurs apparences (formes, étiquettes, contenances, matières, détails...) ont évolué au cours du temps et il est d’ailleurs parfois difficile de les dater avec précision. Leur valeur varie en fonction de leur âge, de leur état, de leurs caractéristiques et de leur rareté.

Historique des mignonnettes
Il faut remonter à la période Romaine (et oui !) pour voir apparaître les premières mignonnettes de vin, sous la forme à cette époque d’amphores miniatures. Celles-ci étaient envoyées par les négociants aux acheteurs afin qu’ils puissent goûter la marchandise. Elles ont donc à l’origine un but promotionnel.
Vers la fin du 19ème siècle, l’apparition des distilleries industrielles favorise la production de ces mini-bouteilles, qui comme leurs ancêtres, sont destinées principalement aux clients. Ce sont notamment les grandes marques de whisky, cognacs, liqueurs, porto et pastis qui vont se lancer dans ce type de format. Excepté leur contenance, les mignonnettes ont souvent la même forme et la même étiquette que les formats de base.

Par la suite, ces mini bouteilles vont très rapidement se diffuser comme par exemple dans les hôtels et les trains, passant ainsi de l’objet promotionnel à un objet de consommation, puis plus tard, à l’objet de collection ! (Pour info, un collectionneur de mignonnettes se nomme : “buticulamicrophiliste”. Facile à retenir, non ?). Le développement et la diffusion des mignonnettes est fulgurant durant la période 1950/1970. En effet, la plupart des producteurs (distilleries, marques, revendeurs, etc.) disposent de mignonnettes à leur nom. C’est donc au cours des années 70 que cet objet va susciter l’intérêt des collectionneurs et leur prix va subir une hausse durant cette période.

Contenance, aspect et datation
La contenance des mignonnettes oscillent entre 2 et 10 cl, parfois 20 cl. En ce qui concerne la liqueur de la Grande Chartreuse, les mignonnettes sont de 3 cl, sauf l’élixir Végétal dont deux formats existent : 8 et 10 cl. Ceci, vous l’aurez compris, le place donc dans la catégorie des mignonnettes ! Les bouteilles contenant entre 10 et 20 cl sont nommées quant à elles “Petites Bouteilles”, par exemple dans la gamme de chartreuse des années 1950, plus récemment pour de la VEP ou encore les Flasks.
En ce qui concerne l’aspect de ces petits bijoux, la matière dont ceux-ci sont réalisés, diffèrent selon la période, la marque, ou même l’occasion pour laquelle ils sont réalisés. Même si de nos jours, les mignonnettes sont principalement faites en verre, d’autres matières ont été utilisées telles que : porcelaine, cristal de Baccarat, barbotine, grès, argile, résine... Quant aux formes, elles sont toutes aussi variées : miniatures, fioles, amphores, cruchons, aiguières...

Je vous rassure, pour ce qui est de la chartreuse, toutes ont été fabriquées en verre, à l’image des bouteilles de liqueur ! J’en ai repéré de nombreuses variantes, notamment au niveau du goulot plus ou moins renflé selon les modèles. Il est parfois difficile de dater avec précision les mignonnettes. Cependant, certains éléments peuvent nous aider à leur donner un âge, particulièrement en observant les étiquettes comme les mentions légales, le pourcentage d’alcool (indiqué ou non), la fermeture (liège, capsule en étain ou bouchon à vis), etc... D’après nos renseignements, les plus vieilles mignonnettes de la liqueur des pères chartreux dateraient de l'entre-deux-guerres.


Conservation et consommation

Une des questions que beaucoup de personnes peuvent se poser est de savoir comment ces mignonnettes se conservent. Comme leur grande soeur, la protection à l’abri du soleil, de la chaleur et de l’humidité sont les principaux critères pour les garder en bon état. Avec le temps les miniatures peuvent subir une évaporation même si elles n’ont jamais été ouvertes, cette évaporation est souvent appelée la "part des anges”.
Les mignonnettes sont-elles consommables ? Je sais que pour nombreux collectionneurs, cette action est inenvisageable et demeure un sacrilège, mais en effet ces petits bijoux peuvent se consommer s'ils ont été bien conservés. A cette condition elles évoluent aussi avec l’âge, comme c’est le cas des formats plus traditionnels, et ne perderaient rien de leur potentiel dégustatif. J’ai personnellement vérifié cette affirmation en ouvrant récemment 2 miniatures de chartreuse : une voiron verte début des années 80, et une voiron jaune des années 70. Mon constat est simple : magnifique ! Elles n’ont rien perdu de leur saveur, bien au contraire.

Pour conclure, les mignonnettes restent des objets de collection et leur prix peut atteindre plus de 50/100 € pour des modèles anciens et/ou rares. Il est difficile de connaître l’apparition des premières mignonnettes de chartreuse et de savoir s’il en existent pour chaque modèle et chaque période. Nous sommes donc preneurs de toutes informations à ce sujet ! Photos bienvenues !

[Article rédigé par Vin's, merci !] 
Voir aussi: